Deux millions pour protéger la santé humaine et les écosystèmes dans les parcs périurbains

Les parcs nature périurbains sont une source de bienfaits pour la santé physique et la santé mentale des gens qui les visitent et constituent des refuges pour la faune et la flore.

Les parcs nature périurbains sont une source de bienfaits pour la santé physique et la santé mentale des gens qui les visitent et constituent des refuges pour la faune et la flore.

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Le projet PARCS en santé a obtenu deux millions de dollars sur cinq ans pour aider à protéger la santé humaine et les écosystèmes dans les parcs nature périurbains selon l’approche Une seule santé.

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Le projet PARCS en santé, dont la responsable est Cécile Aenishaenslin, professeure à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, a été mis sur pied par une équipe de recherche interdisciplinaire en partenariat avec les organisations et municipalités qui gèrent six parcs nature périurbains des régions de Montréal, de la Montérégie et de l’Estrie.

Les deux millions de dollars obtenus du programme de subventions Alliance du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et du programme Accélération de Mitacs permettront d’étudier une situation complexe. En effet, ces parcs nature périurbains sont une source de bienfaits pour la santé physique et la santé mentale des gens qui les visitent et constituent des refuges pour la faune et la flore. Cependant, leur équilibre écologique est menacé pour plusieurs raisons, dont la perte de biodiversité, la présence d’espèces exotiques envahissantes, la surabondance de certaines espèces et les changements climatiques. Notamment, la capacité de régénération et d’adaptation des forêts et de l’ensemble des végétaux est mise à mal par le broutage intensif d’espèces comme le cerf de Virginie. Cette situation profite à l’établissement d’autres espèces envahissantes comme les tiques, ce qui favorise l’émergence de maladies qui menacent la santé humaine, telle la maladie de Lyme.

«Ce projet a été élaboré en suivant l’approche Une seule santé, qui reconnaît que la santé des animaux, celle des écosystèmes et celle des humains sont étroitement liées», explique Cécile Aenishaenslin, qui se spécialise dans la prévention de la maladie de Lyme et des zoonoses.

«Pour réaliser ce projet, nous avons besoin de plusieurs expertises ainsi que des citoyens pour disposer des connaissances nécessaires à la mise en place d’une stratégie d’intervention durable et acceptable pour les parcs. Elle devra permettre de réduire au maximum les risques pour la santé humaine et ceux pour la biodiversité», poursuit la chercheuse.

Le déséquilibre écologique

Le projet PARCS en santé étudiera les cerfs de Virginie sous plusieurs angles. C’est le rôle notamment d’un des coresponsables du projet, Jean-Pierre Tremblay, professeur au Département de biologie de l’Université Laval et spécialiste des interactions entre les cervidés et leur habitat.

«Mon équipe regardera comment les cervidés présents dans les parcs perturbent leur environnement et influencent l’écosystème, mentionne-t-il. Parce que la présence de cervidés est propice à celle d’espèces envahissantes comme les tiques bien sûr, mais aussi de végétaux comme le nerprun, qui est tolérant au broutage, ce qui lui donne un avantage par rapport aux autres espèces.»

En complémentarité, Martin Leclerc, professeur associé au Département de biologie de l’Université de Sherbrooke, se penchera sur les changements relatifs à l’abondance de cerfs et sur leurs déplacements afin de valider la connectivité entre les différents parcs nature, ce qui permettra de mieux comprendre comment les déplacements des cerfs influent sur la présence et la dispersion des tiques.

Les risques liés aux tiques

L’équipe de Cécile Aenishaenslin aura aussi la tâche d’étudier les interactions entre les tiques, vecteurs de la maladie de Lyme, et des espèces importantes pour leur cycle de vie comme les cerfs de Virginie.

«Nous allons suivre la présence de tiques et de cerfs dans une dizaine de microsites dans chacun des parcs partenaires pendant cinq ans afin de mieux comprendre la relation entre l’abondance de cerfs, de tiques et la présence de risques pour la santé publique dans un contexte de changements climatiques», indique la chercheuse.

L’équipe testera aussi de nouvelles façons de combiner des mesures de réduction des tiques dans certains parcs, dont l’exclusion des cerfs de certaines zones à l’aide de barrières et l’utilisation d’un médicament contre les tiques destiné aux rongeurs sauvages.

Selon Cécile Aenishaenslin, «l’intervention sur les rongeurs fonctionne, mais l’effet demeure limité. Nous voulons donc tester cette technique en synergie avec celle des exclos qui empêchent les cerfs de venir dans certaines zones des parcs. Nous pensons qu’ainsi l’effet de l’intervention pourrait être amélioré».

Le projet PARCS en santé touche donc à l’une des grandes préoccupations des partenaires du projet en santé publique. «Les maladies transmises par les tiques sont très présentes en Estrie, notamment la maladie de Lyme, donc leur prévention est au cœur de nos actions», affirme Geneviève Baron, médecin-conseil à la Direction de santé publique du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de l’Estrie-Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CIUSSS de l’Estrie-CHUS), qui est un partenaire du projet.

L’inclusion de l’ensemble des parties prenantes

Le projet PARCS en santé comprend un volet de science citoyenne, financé par Ouranos, le pôle d’innovation québécois pour l’adaptation à l’évolution du climat.

«Nous demanderons la participation des usagers des parcs à toutes les étapes du projet. En étant membres du projet, ils prendront part aux discussions, à des ateliers de mobilisation, puis nous les inviterons à utiliser notre plateforme Web conçue pour favoriser l’adoption de comportements préventifs dans la lutte contre les tiques», dit Cécile Aenishaenslin.

Le projet évaluera aussi le recours à la science citoyenne pour améliorer les mesures de prévention prises contre les tiques et pour la conservation des écosystèmes.

«Il permettra de coconstruire et renforcer des connaissances scientifiques et empiriques nécessaires à l’adaptation des milieux de vie dans un contexte de climat changeant. Si la science citoyenne se révèle efficace, elle pourrait être mise en œuvre dans les parcs aux prises avec des problématiques similaires au Québec et ailleurs», déclare Nathalie Bleau, coordonnatrice de programmation scientifique en adaptation aux changements climatiques – Milieux de vie chez Ouranos.

Le projet PARCS en santé regroupe plusieurs chercheurs et chercheuses de différentes disciplines et universités. Il réunit aussi de nombreux partenaires, soit Ouranos, la Ville de Montréal (Service des grands parcs, du Mont-Royal et des sports et Espace pour la vie), la Ville de Longueuil, la Ville de Saint-Bruno-de-Montarville, la Ville de Sainte-Julie, la SEPAQ, le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs du Québec, l’Institut national de santé publique du Québec, l’Agence de la santé publique du Canada, le CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, le Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Centre et le CIUSSS de l’Estrie-CHUS.