Guy Rocher: un sociologue parmi les juristes

Guy Rocher

Guy Rocher

Crédit : Ben Seropian

En 5 secondes

De 1979 à sa retraite en 2010, Guy Rocher a travaillé au développement de la sociologie du droit à titre de chercheur au Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal.

Guy Rocher a occupé une place déterminante dans la définition de la sociologie du droit au Centre de recherche en droit public (CRDP) de l'Université de Montréal, où il a enseigné et été chercheur pendant 30 ans. 

Lorsque la directrice du CRDP de l’époque, Andrée Lajoie, invite officiellement Guy Rocher par écrit à devenir chercheur, elle lui confie l’ambitieux mandat de «développer systématiquement le champ de la sociologie du droit».  

Ce à quoi il s’est affairé…

Pionnier de la recherche en sociologie du droit

Pierre Noreau

Pierre Noreau

Crédit : Amélie Philibert, Université de Montréal

Guy Rocher avait le profil que recherchait Andrée Lajoie: il n’était pas juriste, mais avait acquis des notions de droit à sa première année d'études à l’UdeM en 1944 et, surtout, les hautes fonctions qu’il avait occupées dans le gouvernement de René Lévesque allaient lui permettre de porter un regard sociologique sur le droit. 

Le professeur de la Faculté de droit de l’UdeM Pierre Noreau explique: «Guy Rocher s’intéressait à la structuration des rapports sociaux à travers le droit et, au cours de ses premières années au CRDP, il a minutieusement recensé les écrits des fondateurs de la sociologie, dont Weber et Tocqueville, pour voir comment ils traitaient du droit.»  

Fort de cette connaissance, il a ensuite joué un rôle de premier plan dans la redéfinition même du mandat du CRDP, lorsque les organismes subventionnaires ont exigé, au milieu des années 1970, que les projets de recherche soient désormais orientés vers la pluridisciplinarité. 

«Guy Rocher incarnait l’interdisciplinarité et sa présence a été centrale dans la nouvelle configuration du CRDP, qui s’est maintenue pendant deux décennies, ajoute le politologue et juriste de formation. Il apportait un autre point de vue sur le droit, une perspective plus analytique.» 

Toujours chercheur au CRDP, Pierre Noreau estime que Guy Rocher a été un «pionnier de la recherche en sociologie du droit» et qu'il a «tracé la voie aux générations qui allaient le suivre».

Un legs important pour les générations suivantes

Violaine Lemay et Yan Sénéchal

Violaine Lemay et Yan Sénéchal

Crédit : Violaine Lemay (Centre de recherche en droit public de l’UdeM) et Yan Sénéchal (Annie Trudelle)

Violaine Lemay a marché avec plusieurs autres sur le chemin ouvert par le sociologue du droit: non seulement Guy Rocher a été son directeur de thèse au début des années 1990, mais celle qui est aujourd’hui professeure à la Faculté de droit occupe de surcroît le bureau de celui qui fut son mentor: une plaque en fait d'ailleurs mention à la porte du local A-8432 du pavillon Maximilien-Caron!

«Guy Rocher était déjà un monstre sacré lorsqu’il est devenu mon directeur et j’étais très impressionnée par sa façon de m’inciter, sans pression, à plonger dans une culture disciplinaire, raconte-t-elle.   

«Il a laissé un legs énorme, à commencer par le fait d’avoir rendu consensuelle l’importance d’une recherche sociologique pour une saine compréhension des enjeux de la gouvernance par la loi, ajoute Violaine Lemay. Son œuvre disciplinaire est intergénérationnelle et collective.» 

C’est aussi l’avis de Yan Sénéchal qui, après avoir obtenu un baccalauréat et une maîtrise en anthropologie, a fréquenté Guy Rocher à travers ses écrits au cours de ses études doctorales en sociologie du droit.  

«Plus tard en 2010, tandis que je donnais le cours d’introduction à la sociologie, Guy Rocher m’a contacté, car il souhaitait mettre à jour son premier tome d’Introduction à la sociologie générale, et c’est ainsi que notre collaboration a commencé», se remémore celui qui enseigne à la Faculté de droit et au Département de sociologie de l’Université de Montréal et qui est coordonnateur scientifique du projet ADAJ au Centre de recherche en droit public. 

En s’intéressant à l’œuvre de Guy Rocher, Yan Sénéchal a débusqué des chapitres manuscrits d’un traité de sociologie du droit que M. Rocher n’avait pas publié. 

«Lui et moi avons rassemblé le tout en vue de faire paraître cet important manuscrit qui propose d’étudier le droit dans une perspective de pluralisme juridique», ajoute-t-il. 

Yan Sénéchal s’affaire d’ailleurs à poursuivre l’œuvre de Guy Rocher en développant «les angles morts qu’il a laissés, notamment en ce qui a trait à la question des cultures juridiques professionnelles, savantes et profanes qu’il a mises de l’avant».

En savoir plus

Deux autres textes ont paru sur le même sujet. Cliquez sur les hyperliens pour les consulter: Guy Rocher: le professeur tribun et L’idéal démocratique de Guy Rocher, le «sociologue dans la cité» qui célèbre ses 100 ans!

Sur le même sujet

droit sociologie recherche